Piqûre de rappel 

Dans sa cinquième saison, Homeland a mis le cap sur l’Europe. Deux ans et demi après son départ de la CIA, on retrouve Carrie Mathison (Claire Danes) installée à Berlin, avec sa fille Franny et son nouveau compagnon Jonas. Consultant pour le milliardaire allemand Otto Düring, Carrie va rapidement être confrontée à sa vie passée. Le système de sécurité de l’antenne allemande de la CIA est hacké par des activistes berlinois, ce qui provoque la fuite de documents prouvant l’espionnage de citoyens allemands sur le sol européen par la CIA. Pour résoudre cette crise, Saul Berenson (Mandy Patinkin) se déplace en personne à Berlin. Cette saison 5 nous livre plusieurs intrigues : une « guerre froide » entre les Etats-Unis et la Russie sur le sol allemand, liée à la guerre en Syrie et à la fuite, et la préparation d’une attaque à Berlin, par une cellule djihadiste.

Allison Carr (Miranda Otto) est un personnage central dans cette saison. Chef de la station allemande de la CIA, elle se révèle être une espionne envoyée par les Russes. Véritable poison pour Carrie, Saul et Dar Adal tout le long de la saison, Allison va finalement être démasquée. En définitive, elle est tuée en fin de saison dans une embuscade tendue par la CIA. La situation est un peu moins confuse en ce qui concerne l’intrigue djihadiste, d’un réalisme parfois terrifiant. Convalescent à Berlin, Quinn tombe par hasard sur la cellule djihadiste, qu’il va infiltrer. Désirant préparer une attaque au gaz sarin, les terroristes ont trouvé leur cobaye qui est rapidement démasqué. Dans le même temps, les terroristes posent une bombe dans le métro berlinois. Un attentat évité grâce à Carrie, qui arrive juste à temps pour désamorcer la catastrophe. La vidéo de Quinn à l’agonie, sous l’effet du gaz, est diffusée publiquement. Dans la scène finale, Carrie semble faire ses adieux à l’agent de la CIA, entre la vie et la mort.

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Brody, pilier de l’histoire

Homeland débarque en octobre 2011 sur la chaîne Showtime (Dexter, Californication). La première saison connaît un véritable succès. Le duo entre Damian Lewis et Claire Danes fonctionne à merveille et donne un cachet supplémentaire à la série. L’intrigue est simple : Nicholas Brody s’est-il retourné contre les Etats-Unis ? Une question qui va tenir en haleine le téléspectateur pendant une grande partie de la saison. Les certitudes de Carrie, les justifications de Brody et la mesure de Saul, sèment le trouble dans nos esprits. Une première saison presque parfaite, ponctuée par un final d’une grande tension, surtout dans sa première partie. Par la réalisation et le jeu des acteurs, la série parvient à nous captiver.

La deuxième saison ne change de pas de cap et démarre très fort. Cette fois, le secret de Brody est percé à jour dans un épisode mémorable (2×04 – New Car Smell). La série joue beaucoup sur la relation entre les deux personnages principaux. Si Homeland est avant tout une série d’espionnage, elle nous parle aussi de la romance entre Brody et Carrie. Malheureusement, la série échoppe aussi de moments moins intéressants. Les histoires de la famille de Brody, qui prend encore plus de place dans cette saison 2, sont souvent ennuyeuses et inutiles. Dana Brody représente le cliché de l’adolescente tourmentée, présent dans de nombreuses séries américaines. De plus, les jeunes acteurs se montrent moins talentueux que leurs homologues établis, ce qui fait tâche dans une série portée par d’excellents comédiens. N’est pas Kiernan Shipka (Sally Draper dans Mad Men) qui veut.

Un tournant bien négocié 

Homeland va finalement s’obliger à se renouveler. Déjà moins présent dans la troisième saison, Damian Lewis quitte la série au terme de cette dernière. Sous les yeux de Carrie, Brody est exécuté par pendaison en Iran. Une décision osée de la part des scénaristes, qui prennent le risque de faire disparaître un des deux piliers de la série. La transition est réussie, Homeland parvient à devenir une « nouvelle série », tout en conservant certaines bases. Chaque personnage doit gérer ses traumatismes. Présent depuis la saison 2, Peter Quinn gagne en importance dans la vie de Carrie comme dans la série. L’ellipse de deux ans entre la troisième et la quatrième saison nous permet d’éviter une phase de deuil, souvent compliquée à traiter dans les séries, surtout dans la durée. L’oeuvre ne tourne désormais plus autour de Brody, que l’on retrouve seulement dans les hallucinations de sa compagne ou à travers Franny et sa chevelure rousse.

Forcément, du fait de la disparition de « l’effet découverte » présent lors de la première saison, Homeland se montre parfois moins excitante et plus irrégulière. Toutefois, la série parvient à trouver de nouveaux enjeux et à mettre en scène de nouvelles menaces, au Moyen-Orient (Iran) comme en Europe (Berlin). Ces changements de décor permettent aussi de faciliter le renouvellement permanent de la série. Le téléspectateur est amené à découvrir de nouveaux personnages, de nouveaux paysages, de nouveaux ennemis, au cœur de civilisations différentes. Claire Danes tient toujours son rôle de Carrie mais peut parfois agacer. Dans chaque saison, la série nous offre un ou deux épisodes lors desquels Carrie, bipolaire, décide de ne plus prendre ses médicaments. Par conséquent, le personnage sombre dans la folie, l’hystérie et dans des hallucinations parfois dispensables. On espère que la sixième saison va mettre fin à cette tradition.

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Extrait de la BA de la Saison 4

Homeland/24 : même combat?

Très différentes au départ, il est possible de faire un rapprochement entre 24 et Homeland depuis la quatrième saison. Sans parler de plagiat, les scénaristes semblent s’inspirer d’avantage de la série incontournable des années 2000. Carrie Mathison endosse le rôle de Jack Bauer, la violence en moins. Dans la cinquième saison, Carrie parvient à convaincre le terroriste de ne pas faire sauter la bombe dans le métro. Un dénouement qui manque un peu de réalisme : alors que 24 assumait totalement son côté sensationnel, on attendait autre chose de la part de Homeland. Avec Allison, la série reprend aussi un des pêchés mignons de 24 : la taupe. Dans chaque saison, Jack Bauer finissait par démasquer un espion. Dans certains épisodes, on retrouve également cette tension quasi-permanente et une course contre-la-montre pour déjouer les plans des terroristes.

Malgré ces ressemblances, la série a su conserver sa singularité. Il ne faut pas voir Homeland comme un nouveau 24, loin de là. Les dialogues restent très travaillés et le rythme est certainement moins effréné pour Carrie Mathison que pour Jack Bauer. De plus, Homeland adopte en une vision moins manichéenne que son homologue. Les Etats-Unis n’ont pas toujours le rôle du grand gentil. Dès les premières saisons, Homeland déplore les frappes qui tuent des civils en Afghanistan, ce qui avait contribué au retournement de Brody, très affecté par la mort du fils d’Abu Nasir. En outre, le réalisme est une des grandes forces d’Homeland. Depuis deux saisons, la série nous renvoie souvent à de terribles événements contemporains. Le réalisme est renforcé par l’utilisation de noms bien connus comme Bachar el-Assad ou Vladimir Poutine. Saul fait même allusion aux attentats de janvier 2015 en France dans la cinquième saison. Cet ancrage dans l’actualité est travaillé par les scénaristes, probablement désireux de renforcer la crédibilité du show.

La sixième saison va être marquée par un retour aux Etats-Unis, à New York. Pour la première fois, les téléspectateurs vont découvrir la Présidente élue par ses concitoyens. Alex Gansa, le showrunner de la série, a indiqué que la période transitoire de passation de pouvoir serait « complexe et fragile », dans une interview accordée à Entertainment Weekly en juin dernier. Un nouveau point commun avec 24, mais ce que l’on retient surtout, c’est ce nouvel écho à la réalité puisque l’investiture de Donald Trump aura lieu le 20 janvier. En ce qui concerne Homeland, rendez-vous le 15 janvier pour le grand retour de la série sur Showtime.

Clément Gavard

5/5 (2)

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