– Martin Provost ; 2017 –
Le très césarisé Martin Provost (sept récompenses pour « Séraphine » en 2009) revient au cinéma avec « Sage Femme », une comédie-dramatique portée par les talentueuses Catherine Deneuve et Catherine Frot. Pour son sixième long-métrage, le réalisateur réussit à nous livrer un film subtil bercé entre rire et émotion.
Claire, divorcée, est une femme sérieuse. Vivant seule avec son fils, étudiant en médecine, elle ne sort pas, ne boit pas une goutte d’alcool et ne supporte pas le tabac. Toute sa vie, elle s’est dévouée corps et âme à son métier, celui de sage-femme. Préoccupée par la fermeture de la maternité où elle exerce, elle voit son douloureux passé resurgir lorsqu’une ancienne connaissance refait surface. Béatrice, ancienne maîtresse de son père disparu, débarque dans sa vie. Fantasque et égoïste, profitant pleinement de la vie, elle est l’exact opposé de Claire. Pourtant les deux femmes vont devoir s’apprivoiser, s’entraider jusqu’à s’apprécier… À travers ce scénario, Martin Provost réussit à dessiner le portrait de deux femmes, d’apparence ordinaire, mais qui, par leur histoire respective et leur destin croisé, deviennent attachantes et touchantes.
Avec Séraphine (2008) et Violette (2013), Martin Provost s’était essayé au biopic en racontant pour le premier la vie de la peintre Séraphine de Senlis et pour le second celle de l’écrivaine Violette Leduc. Avec Où va la nuit (2011), il avait réalisé un film dramatique adapté du roman Mauvaise Pente de Keith Ridgway. Dans Sage Femme, il touche cette fois au genre hybride de la comédie-dramatique et réussit à trouver l’équilibre parfait entre ses deux ingrédients essentiels : le rire et l’émotion. Et si le scénario n’est pas l’élément que nous retenons, sa mise en scène est pour autant très intéressante ! En effet, sans aucun filtre, nous assistons aux parcours respectifs, parsemés d’embûches, de deux femmes, puis à leur rencontre et enfin à la lente évolution de leur relation.
Un duo de choc !
Dans une ambiance plutôt intimiste, c’est le qualificatif « brut » qui nous vient tout de suite à l’esprit lorsque nous prêtons attention au traitement du son et à celui de l’image. En effet, le son est intense, au point d’en être gênant, plus particulièrement lors des scènes de sifflements qui sévissent dans la tête de Béatrice, provoquant une expérience sensorielle et auditive fidèle à la réalité qui nous donne l’impression d’être nous-mêmes confrontés à ces nuisances sonores. L’image est naturelle, et notamment lors des nombreuses scènes d’accouchement, filmées avec intensité et réalisme. À souligner également, l’intelligent partis pris de Martin Provost de proposer une fin suggestive à son film, une façon pour le spectateur d’imaginer tous les possibles, malgré le destin, parfois déjà tracé, d’un personnage.
Côté casting, quelle belle idée de réunir à l’écran – et pour la première fois – nos deux Catherine préférées du cinéma français ! Ensemble, elles forment un véritable duo de choc ! Opposées dans leur personnage, mais complémentaires dans leur jeu, elles sont réjouissantes ! À souligner également la présence forte à l’écran d’un des acteurs les plus prolifiques du cinéma français : Olivier Gourmet ! Si son personnage semble pourtant très antipathique, ou plutôt agaçant, autant pour le spectateur que pour Claire au premier abord, il finit par nous faire fondre et à devenir très attachant, une autre surprise qui nous fait adhérer à ce film. Sage Femme, une première comédie-dramatique rondement menée par Deneuve, Frot et Gourmet sous l’œil passionné du passionnant Martin Provost !
Aurélie David
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