– John Trengove ; 2017 –
Les Initiés, premier film de John Trengove, nous plonge dans une Afrique du Sud tiraillée entre traditions, modernité et tabou d’une homosexualité prohibée. Un sujet fort, qui ne réussit malheureusement pas à porter tout du long cette œuvre d’une heure trente.
Les Initiés, de son titre original The Wound est un film sud-africain réalisé par John Trengove. Cette première œuvre, qui a ouvert le 67ème Festival de Berlin – après une visite à Sundance – relate l’histoire de Xolani, un jeune ouvrier solitaire qui participe avec d’autres hommes à des cérémonies rituelles d’initiation adolescente. Soumis au tabou ambiant, ce dernier cache précieusement son homosexualité à son entourage.
La quête d’une masculinité différente
A travers ce premier long-métrage, on retrouve deux sujets extrêmement porteurs autant émotionnellement que scénaristiquement parlant. D’une part, la quête de masculinité, d’autre part l’homosexualité.
Le thème de la masculinité est interrogé subtilement à travers le rituel que vivent ces jeunes hommes de l’ethnie Xhosa : « l’uwaluka ». Les ainés les initient avant et après la circoncision, un rituel rarement mis en scène au cinéma, sensé tester leur courage, leur virilité, et surtout symboliser le passage vers l’âge adulte. Lors de ce rituel brutal, Ils ne peuvent montrer leur souffrance. Cette douleur, dans sa manière d’être filmée – pourtant suggérée – est quasiment ressentie par le spectateur, notamment grâce à des plans extrêmement resserrés sur les visages mais également grâce au sound-design. L’homosexualité est quant elle interrogée sous le prisme d’une romance interdite entre le personnage principal, Xolani et un autre homme : Javi. Cette idylle, présentée comme impossible dans une société sud-africaine contraignante fait, de ce fait, retomber le film dans une narration légèrement plus classique.
Des personnages peu fouillés
C’est d’ailleurs, à partir de l’évocation de cette romance, que l’on constate les premiers défauts du film. A savoir, la caractérisation des personnages. Que ce soit l’équilibre entre ces protagonistes ou leur psychologie, ces deux aspects ne sont malheureusement pas assez creusés, laissant ainsi le spectateur sur sa faim, et parfois même dans l’incompréhension. Pour cause : on comprend rarement leurs actions, on ne sait pas ce qu’ils pensent et on comprend encore moins pourquoi ils interagissent de telle ou telle façon. Si l’amour que ressent Xolani est explicité, son amant Javi, et son jeune initié ne sont finalement que des faire-valoirs permettant à l’œuvre d’exprimer la difficulté de Xolani lui même à vivre ses propres homosexualité et masculinité.
Quant aux autres personnages masculins, ils sont presque anecdotiques. Résultat ? On finit malheureusement par s’ennuyer et surtout par être frustrés que le sujet ne soit pas davantage fouillé, au profit de plans d’une beauté certes saisissable mais parfois trop contemplatifs, et ce, sans servir le scénario du film. Malgré cette déception, on aime ce contraste visuel entre les corps noirs de ces adolescents couverts de blanc lors des cérémonies rituelles, et leurs couvertures d’un rouge vif éclatant. On apprécie en revanche moins cette nature luxuriante, filmée abusivement à coups de caméra à l’épaule, qui desservent parfois le déroulement de la scène elle même.
Pour finir, la fin du film se révèle décevante également. En cause ? Un final où la violence et la brutalité ne servent aucunement l’histoire et se contentent de l’alourdir. Une fois encore, la compréhension des personnages et de leurs motivations reste aux abonnés absents et confirme l’impression d’inachevé vécue pendant cette heure et demie de projection. Dommage.
Laura Bonnet
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