– Yvan Attal ; 2017 –
Pour son cinquième long-métrage, l’acteur et réalisateur français Yvan Attal s’intéresse cette fois aux préjugés et à leur combat grâce à un outil particulier : l’éloquence ! Dans Le Brio, Camélia Jordana et Daniel Auteuil campent ainsi deux personnages radicalement opposés et emplis d’idées préconçues, mais qui vont chacun apprendre de l’autre, et notamment grâce à cet art de l’éloquence qui confie les pleins pouvoirs aux mots.
L’une est étudiante tout droit venue d’un quartier de Créteil, l’autre est un professeur de droit parisien. L’une rêve de devenir avocate, l’autre est reconnu pour ses provocations racistes envers ses élèves. Et c’est au sein de l’université Panthéon-Assas, situé au coeur de Paris, que ces deux personnages opposés se rencontrent. Quand la jeune Neïla Salah, interprétée par Camélia Jordana, arrive en retard à son premier cours de droit, l’imminent et reconnu Pierre Mazard, joué par Daniel Auteuil, la prend rapidement en grippe. Mais lasse de ses nombreux dérapages racistes, la direction de l’université parisienne réserve à ce dernier un conseil de discipline afin d’éviter tout nouveau scandale. En préparant Neïla à un prestigieux concours d’éloquence réservé aux premières années, Pierre décide alors de faire de cette étudiante son amende honorable. Si au départ, il leur est difficile à tous les deux d’effacer leur préjugés, Neïla et Pierre vont finalement réussir à se comprendre et à s’apprécier grâce au pouvoir des mots. Un nouveau film d’Yvan Attal très réussi et qui réunit à l’écran un duo inattendu, mais convaincant.
Dans Le Brio, Yvan Attal s’intéresse tout d’abord aux mots et à leur portée, aux différents langages et à ce qu’ils disent, ou non, des personnes qui les emploient, mais également aux postures et attitudes diverses prises par les gens. Pour faire ce travail, le réalisateur use volontairement de nombreux préjugés sur les banlieues, les noms de famille ou sur les vêtements portés, et qu’il place dans la bouche de ses personnages principaux. Et grâce à cet art de l’éloquence, ces idées reçues sont démontées une à une au fur et à mesure, aussi bien de l’apprentissage de Neïla que de l’évolution de sa relation avec Pierre. Mais au-delà de cet apprentissage difficile de l’éloquence, Yvan Attal filme également la confrontation entre deux personnes, de prime abord complètement différentes, puisque l’une a la cinquantaine raciste tandis que l’autre a plutôt la jeunesse révoltée. Et c’est cette première rencontre houleuse, puis cet apprivoisement mutuel grâce aux mots, qui se joue entre Neïla et Pierre, que filme le cinéaste français. Enfin, c’est également le monde de l’université, et notamment parisienne, l’univers du droit ainsi que la relation entre un professeur et son élève qui se dessinent également devant la caméra d’Yvan Attal.
Et c’est sous les traits de Daniel Auteuil et Camélia Jordana que Pierre Mazard et Neïla Salah prennent vie. Un retour en force au cinéma pour Daniel Auteuil, qui s’était illustré précédemment dans un drame (Au nom de ma fille, 2016), au sein d’un rôle, moins sombre certes, mais tout aussi ambigu. Derrière son apparent racisme se cache en vérité un autre homme, mais qu’il est difficile de percer à jour. Deux facettes que Daniel Auteuil réussit subtilement à faire cohabiter au sein d’un même personnage. De plus, le texte, pas facile, puisqu’il est surtout un enchaînement d’arguments afin de tendre vers l’éloquence, est maîtrisé à la perfection. On assiste ainsi à une argumentation futée et féroce dictée avec habilité et talent par Daniel Auteuil. Mais face à lui, Camélia Jordana, qui s’illustre d’habitude sur scène mais qui s’était déjà essayé au cinéma (Je suis à vous tout de suite, 2015 ; Nous trois ou rien, 2015), ne démérite pas ! Elle-aussi se lance avec verve dans ce ballet des mots. Daniel Auteuil et Camélia Jordana se complètent, donc, et confèrent au dernier film d’Yvan Attal, Le Brio, attrait et panache !
Aurélie David
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