– Carlos Saldanha ; 2017 –
Après L’Âge de Glace et Rio, le réalisateur brésilien Carlos Saldanha livre son nouveau film d’animation intitulé Ferdinand. Une histoire drôle et attachante autour d’un jeune taureau qui cherche désespérément à prouver aux autres qu’il n’est pas obligé de se battre, malgré ce que sa nature semble lui dicter. Un film animé et coloré, mais qui se veut également être une critique assumée contre l’une des pratiques de la région ibérique : la corrida.
Ferdinand est un taureau tendre et sensible. Et contrairement aux autres taureaux de son élevage, il refuse de se battre. Alors qu’il est encore petit, il s’échappe de la « Casa del Toro » et trouve refuge auprès d’une famille qui apprend à l’aimer. Plus grand, victime de son imposante carrure, Ferdinand se retrouve malencontreusement arraché à sa famille et ramené à son ancien élevage. Afin d’éviter d’être envoyé au combat au sein d’une corrida, Ferdinand décide de tout faire pour retrouver sa famille. Il se lance alors dans un incroyable périple à travers l’Espagne, accompagné d’une équipe complètement déjantée. Destiné à toute la famille, Ferdinand est un joli film d’animation qui, derrière ses dessins travaillés et son ambiance survoltée, livre un point de vue sur la corrida, une pratique qui déchaîne les passions en Espagne.
A travers Ferdinand, on retrouve naturellement la patte de Carlos Saldanha, découverte dans ses précédentes réalisations. En effet, les dessins sont soignés et colorés, à l’image de l’univers présenté dans Rio. Différents paysages de l’Espagne défilent à l’écran et façonnent ainsi notre imagination sur ce que l’on connaît de ce pays. De plus, c’est toujours dans une ambiance déjantée que sont plongés tous les personnages. Comme dans L’Âge de Glace, les gags s’enchaînent, amenant même un moment de grâce lors d’un duel de chorégraphies entre des taureaux et des chevaux, tous plus loufoques les uns que les autres. Un univers qui ne peut donc que charmer les petits comme les plus grands grâce à des personnages que l’on affectionne et à une histoire aussi drôle que touchante.
Un film d’animation à double portée
Mais au-delà de sa forme destinée à plaire aux enfants, Ferdinand confirme surtout un autre rôle des films d’animation : leur portée sociétale. À travers le personnage de Ferdinand, le réalisateur indique par exemple aux jeunes spectateurs le danger de certaines idées reçues. En effet, Ferdinand est un taureau et est censé être un animal dangereux et destiné à se battre au sein d’une arène espagnole. Mais Ferdinand se sent différent. Il ne souhaite pas combattre mais aimer et être aimé en retour par une vraie famille. Il n’aspire pas à être un héros au sein d’une corrida en défiant un torero contrairement à ses autres camarades. C’est grâce à ce personnage que Carlos Saldanha défie à sa manière les idées préconçues auprès des plus petits.
De plus, il livre son propre regard sur la corrida. Ce « show » entre le taureau et le matador au centre de l’arène, acclamé par les « olé » du public, est présenté comme un inconditionnel de la tradition espagnole. Mais le réalisateur ne manque pas de souligner ce qu’il en pense. À travers le désaccord entre ses personnages, d’un côté les taureaux qui veulent combattre le matador et de l’autre un Ferdinand qui ne souhaite pas se laisser guider par la violence, le réalisateur réveille un vieux débat sur cette pratique, entre ses détracteurs et ses aficionados. Avec son héros Ferdinand, Carlos Saldanha se positionne clairement en la défaveur de cette pratique. Ferdinand, un film familial tendre et amusant mais qui porte un regard tranché sur l’une des plus grandes passions ibériques.
Aurélie David
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