Cette rentrée cathodique 2017 a été marquée par l’adaptation du Saturday Night Live par M6, l’émission culte de nos voisins américains. Orchestrée par Gad Elmaleh, l’émission a rassemblé près de 3 millions de curieux. Que penser de ce pari ? Raté pour certains, réussi pour d’autres, le Saturday Night Live made in France divise mais fait parler de lui ! Si la comparaison avec la version originale semble incontournable, nous nous en passerons. En effet, tout le monde est d’accord pour dire que jouer au jeu des 7 différences entre un monument de 40 ans et un nouveau-né est d’avance fatal pour la version française : sur ce point, le débat est clos. Soyons sport et tentons de regarder l’émission sans le prisme de sa « maman » américaine, mais seulement comme une nouvelle arrivante sur nos petits écrans français.

En maître de cérémonie, Gad Elmaleh fait très bien le job ! L’humoriste, qui challenge sa carrière avec son spectacle Oh my Gad ! aux Etats-Unis, s’essaie le temps d’une vanne à tacler nos politiciens, chose inédite dans la panoplie de l’humoriste. Elle ne marquera certainement pas les esprits, mais on salue tout de même cette séquence. Du côté des sketchs, la performance de Gad Elmaleh se montre plutôt savoureuse, n’hésitant pas à aller dans l’autodérision. Par ailleurs, le panel des invités du SNL est plutôt bien choisi, entre l’ancienne génération made in Canal avec Jamel Debbouze, ou avec Gérard Darmon, clin d’œil aux Nuls, qui s’étaient eux-mêmes inspirés du SNL pour Les Nuls l’Emission ; et la nouvelle garde de l’humour français, notamment la bande à Fifi et les prometteurs Malik Bentalha, Ahmed Sylla et Marc-Antoine Le Bret. L’alchimie fonctionne très bien et la complicité entre les comédiens est assez irrésistible dans les aléas du direct où le naturel rafraîchit et compense un manque de rythme.

Que dire des différentes saynètes ? L’autodérision était de mise pour la sixième chaîne, avec des parodies de ses émissions phares, dont on retient surtout la performance de l’imitateur Marc-Antoine Le Bret en Cyril Lignac, mais aussi celle d’Ahmed Sylla en Karine Lemarchand dans Une ambition « très intime » qui livre la meilleure performance et la séquence la plus drôle de l’émission. Malgré ces bonnes surprises, le manque de rythme se fait cruellement sentir. Les sketchs sont parfois si longs qu’ils en deviennent gênants, comme la revisite de Mariés au premier regard, pourtant prometteur dans ses premières minutes avec un Vincent Desagnat assez comique. Toutefois, cette autodérision rime surtout avec autopromotion, la chaîne profitant naturellement de l’émission pour faire écho au reste de sa programmation, entre l’intervention (inutile) de Kev Adams qui fait un clin d’œil au spectacle Tout est possible, et les références à la saga Star Wars dont M6 possède les droits de diffusion. Les plus gros ratés sont sûrement les copier-coller assumés de sketchs cultes de la version américaine, où Gérard Darmon échoue en pâle copie de Steve Martin pour Les Vœux de la Bonne Année, et de Christopher Walken en manager d’un groupe de rock (sans doute le sketch le plus raté de l’émission, il en faut bien un). Seul Malek Bentalha s’en sort plutôt bien dans la reprise du White Like Me d’Eddy Murphy. Malgré des efforts notables, l’émission s’essouffle progressivement, et là c’est le drame : nous décrochons. Même les live plutôt fades ne parviennent pas à nous rattraper en vol.

En définitive, ce premier Saturday Night Live à la française ne va pas rester dans les annales mais évite de loin le fiasco. Pour un premier jet, l’émission est loin d’être condamnable, et ne peut être que perfectible notamment côté réalisation. Même si l’écriture et le rythme sont parfois bancals, le futur de l’émission devrait être prometteur, si elle arrive à s’émanciper de sa version originale américaine.

Chloé Gavard

5/5 (1)

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