– Thomas Alfredson ; 2017 –

Après le succès critique de Morse et la conquête hollywoodienne de La Taupe, Thomas Alfredson est de retour avec une nouvelle œuvre de commande, l’adaptation du roman éponyme de Jo Nesbø. Produit notamment par Martin Scorsese, emmené par un casting de choix, de Michael Fassbender à J.K. Simmons, en passant par Rebecca Ferguson et Val Kilmer, The Snowman (Le Bonhomme de Neige, en français) est un thriller aux contours prometteurs qui, pourtant, s’avère bien terne en bout de course.

De fait, The Snowman renoue avec l’esthétique des premiers temps du réalisateur suédois ; celui-ci retrouve les paysages enneigés de l’Europe du Nord, aperçus dans Morse, pour inscrire son polar dans une atmosphère âpre et véritablement glaçante. A l’image du Wind River de Taylor Sheridan, les paysages enneigés offrent un cachet particulier à l’œuvre et les nombreux plans contemplatifs permettent de mettre en relief l’étreinte hostile du climat sur les personnages, acculés par la tension croissante et omniprésente. Certains plans se révèlent même tout à fait impressionnants, particulièrement lorsque Thomas Alfredson filme les routes norvégiennes.

L’austérité des paysages se conjugue à une aspiration morbide, autre motif important du cinéma d’Alfredson. On retrouve en ce sens un réalisme très abrupt lorsqu’il s’agit de filmer les corps et les mutilations, ce qui contribue à donner de la profondeur à une tension qui relève alors à la fois du récit lui-même et des attentes visuelles.

The Snowman - Photo 1

Universal Pictures

C’est néanmoins dans sa narration que The Snowman présente le plus de lacunes. Le récit parcellaire, voire même lacunaire, de l’enquête du détective Harry Hole, incarné par un Michael Fassbender toutefois salvateur pour la réalisation, peine à convaincre et les ressorts scénaristiques se révèlent ou trop évidents, ou complètement absurdes. Par ailleurs, le montage se fait l’écho de cette confusion scénaristique en ce qu’il se révèle relativement chaotique, brisant de façon récurrente la narration. Ainsi relève-t-on des scènes tronquées ou des passages où le montage alternatif met en parallèle des événements dissonants, ce qui nuit à la tension croissante du thriller. C’est finalement le dernier tiers de l’œuvre qui vient confirmer les lacunes de la réalisation d’Alfredson qui, dans son ensemble, ressemble davantage à un brouillon esthétique qu’un thriller haletant.

On relèvera pourtant volontiers les belles ambitions du cinéaste qui, au-delà de l’aspect esthétique, réussit à ouvrir des pistes intéressantes, entre la question tragiquement contemporaine des relations entre pouvoir et harcèlement, et la question des nouvelles technologies. Mais là encore la réalisation traîne du pied, et J.K. Simmons lui-même nous transmet un goût d’inachevé.

The Snowman - Photo 2

Universal Pictures

Aussi maladroit que le jeu, épuisé, de Val Kilmer, The Snowman peine donc à convaincre, malgré l’installation efficace d’une angoisse ambiante et son esthétique soignée. Les insuffisances scénaristiques et le montage chaotique de la réalisation finissent par occulter les bonnes idées de Thomas Alfredson pour finalement perdre le spectateur dans une grande étendue cinématographique bien vide.

Vincent Bornert

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