– Diastème ; 2015 –

Dans les années 1980, Marco Lopez (Alban Lenoir) est un skinhead d’extrême-droite qui n’apprécie rien de plus que de sortir avec ses amis Braguette (Samuel Jouy), Grand-Guy (Paul Hamy) et Marvin (Olivier Chenille) pour coller des affiches du parti d’extrême-droite et se défouler sur les antifas ou toute personne qui leur déplairait. Mais peu à peu, cette idéologie de haine et cette violence lui seront de plus en plus insupportables. Tant bien que mal, il cherchera progressivement à fuir ce milieu, malgré l’incompréhension et le rejet de ses amis.

Une haine omniprésente

Réalisé par Diastème, Un Français suit sur plusieurs décennies le parcours difficile de Marco, marqué de façon indélébile par cette haine qui l’a consumé. Présente partout, s’immisçant, ravageuse et destructrice, dans tous les aspects de la vie des protagonistes, cette haine finit presque par être le personnage principal du film.
Une rage qui est bien entendu visible à travers la violence physique – on serait même tenté de parler d’ultraviolence – omniprésente dans la première partie du film, qu’on ne recommande pas aux âmes les plus sensibles. Pour cause, les skins sont adeptes du coup de poing, de ceinture ou de batte pour faire passer leur idéologie auprès de leurs adversaires antifas ou Redskins. Ils n’hésitent pas à user de violence gratuite à l’encontre des personnes auxquelles ils reprochent leurs origine ou orientation sexuelle. C’est d’ailleurs le résultat d’un énième acte de violence gratuite de la part de membres de sa mouvance qui convaincra Marco de tourner le dos à cette idéologie.

La haine ronge les différents protagonistes au plus profond de leur être. Bien plus que la violence physique, elle provoque une violence de tous les jours se traduisant dans les mots, les attitudes. Elle enferme les extrémistes dans une vision manichéenne de la vie, où l’altérité est l’ennemie. Elle détruit les amitiés les plus anciennes, sape l’amour d’un couple, sépare un père de sa fille. Elle devient si banale, si quotidienne, que la pointer provoque une incompréhension la plus totale de la part de ceux qu’elle habite.

Un film ancré dans l’histoire

Si Un Français est une œuvre de fiction, le film n’en demeure pas moins ancré dans l’histoire et la réalité. Des combats entre punks et skins dans les années 80, à la Manif pour tous de 2013, en passant par la mort de Brahim Bouarram en marge du défilé en l’honneur de Jeanne d’Arc du 1er mai 1995 : de nombreux faits marquants de l’histoire de l’extrême-droite de ces dernières décennies sont évoqués. Des actions bien réelles de skinheads ou d’identitaires, comme la mort d’un Mauritanien forcé à boire de la soude ou l’organisation de distributions de soupe de cochon forment des scènes majeures du film.

Un Français montre aussi la porosité et la proximité historique entre les franges les plus radicales des identitaires et le Front national. Marco et ses amis participent à des réunions, collent des affiches du parti, rejoignent le DPS (service de sécurité du Front). Issus de la classe populaire, ils se retrouvent grâce à leur idéologie au contact de membres autrement plus aisés de la société, des classes sociales totalement hétéroclites mais unies par la même haine. La volonté du parti de se donner une image plus respectable est bien dépeinte à travers le personnage de Braguette, un temps candidat sous son vrai nom de Jean-Michel Cayrol, avant d’être évincé du parti en raison de son extrémisme.

Un Français est un drame. Un drame d’autant plus marquant qu’il est proche de la réalité. Sans être moralisateur, c’est aussi un avertissement par sa froide description de la violence inhérente à toute idéologie de haine.

David Bolton

 

 

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