-Luca Guadagnino, 2018-

Nommé pour 4 Oscars et auréolé dans les multiples festivals où il a été présenté, Call Me By Your Name met en scène une idylle d’été entre deux hommes. Quel est notre avis sur ce film phénomène de 2018 ?

Un été d’expérimentation

Été 1983, dans une villa de famille en Italie du Nord, Elio, 17 ans, passe ses journées à lire et à sortir le soir avec ses amis, qu’ils retrouvent chaque année pendant les vacances. C’est alors que débarque Oliver, un étudiant américain qui prépare son doctorat et qui vient travailler auprès du père de l’adolescent, un éminent professeur spécialiste de la culture gréco-romaine.
Aux premiers abords, le jeune Elio n’apprécie pas Oliver, il le trouve trop arrogant. Et pourtant il va irrémédiablement finir par ressentir de l’intérêt et de l’attraction pour ce bel Américain.
Leur relation évolue subtilement. C’est par des regards un peu trop insistants, les excuses d’Elio pour suivre Oliver dans ses déplacements et passer du temps avec lui que se glissent les indices d’une éventuelle future romance entre les deux protagonistes. En ce sens, il faut souligner les performances de Timothée Chalamet (jouant Elio) et Armie Hammer (incarnant Oliver), qui, par leurs regards et gestuelles montrent, avec beaucoup de talent, le changement de nature de leur relation. La posture d’Elio se détend ainsi en présence d’Oliver au fur et à mesure du film, ils discutent plus aisément. C’est d’ailleurs bien plus dans les non-dits de leurs conversations que se devine leur désir. Il y a ainsi une scène où Elio mentionne à Oliver une histoire racontée par sa mère la veille, sur un jeune homme qui n’arrivait pas à avouer ses sentiments à la fille qu’il aimait. La tension ressentie dans cette scène, le regard intense d’Oliver, plein d’attente, fait comprendre très rapidement que la discussion ne tourne plus autour de l’histoire racontée mais qu’il s’agit de leur propre situation. On suit en tout cas, avec intérêt, leur aventure italienne, dans des paysages de cartes postales qui donneraient presque envie de partir en vacances.

Sony Pictures Releasing France

Traiter l’homosexualité au cinéma

Selon les personnages, les enjeux autour de la sexualité ne sont pas les mêmes. En effet, pour Elio, il s’agit bien plutôt de découverte. Il se pose des questions sur sa sexualité. Il flirte avec une de ses amies, Marzia, mais en même temps il ressent du désir pour Oliver. Il est perdu et décide d’expérimenter pour avoir les idées plus claires sur ses sentiments. Pour Oliver il s’agit bien plutôt d’essayer d’assumer son attraction envers les hommes, qu’il essaye d’étouffer coûte que coûte, probablement parce qu’il a été éduqué dans l’idée que l’homosexualité est un péché. En un sens, Elio et son envie de tester des choses vont décoincer Oliver, qui va se laisser porter par la fougue de l’adolescent.
Dans les deux cas, le sujet du film tourne bien autour de l’homosexualité et les questions et les craintes qu’elle peut entraîner, surtout à l’époque du film, en 1983, où les relations entre personnes du même sexe étaient encore largement un sujet tabou et où les luttes pour les droits des LGBT commençaient à peine.
Mais mettre en scène des personnages gays, en faisant de leur sexualité (et de l’acceptation de cette dernière) le sujet central du film, ne deviendrait-il pas trop banal ? Évidemment, cela ne fait que quelques années à peine que la représentation de personnages LGBT se développent réellement mais n’y a-t-il pas une autre façon d’inclure des personnages gays dans une histoire ? Il serait peut-être temps de créer des récits qui ne tournent pas autour de la sexualité des personnages principaux, comme c’est encore le cas dans ce long-métrage.

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Porté par un duo d’acteurs à l’alchimie certaine, Call Me By Your Name traite avec beaucoup de subtilité d’une idylle qui dure le temps d’un été, dans la magnifique campagne italienne. Véritable ode à l’ouverture d’esprit, ce film reste tout de même une histoire d’amour impossible assez classique. On attendait de cette oeuvre « phénomène » un tantinet plus d’originalité, même si elle comble en grande partie nos larges espérances.

Amélie G.

1.67/5 (3)

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