-Jérémie & Yannick Rénier ; 2018-

Jérémie et Yannick Rénier passent pour la première fois derrière la caméra avec Carnivores, un thriller psychologique mettant en scène deux sœurs.

Famille et rivalité

Mona et Samia sont deux sœurs qui semblent liées par une relation très fusionnelle. Les deux suivent la même voie, celle du cinéma, mais avec des résultats différents. Alors que Mona galère à trouver du boulot, Samia vient, quant à elle, d’obtenir un rôle pour le film d’un grand réalisateur : Paul Brozek. Ayant des difficultés à gérer seule le tournage, Samia embauche sa sœur comme assistante. Tiraillée entre les exigences du réalisateur et le bien-être de sa sœur, Mona se retrouve dans une position ambiguë.
De plus en plus, la relation des deux soeurs se teinte de non-dits, de jalousie silencieuse. Dans la première moitié du film les deux jeunes femmes, pourtant proches au début, s’éloignent indéniablement. Mona tente au mieux de guider sa sœur sur le tournage mais Samia lui reproche d’être bien trop sérieuse. En outre, Mona, qui a élu domicile chez sa sœur, se rapproche beaucoup de son neveu, Tom. A tel point que Tom finit par se sentir plus à l’aise et être plus bavard avec sa tante que sa propre mère. Autant dire que Mona comme Samia ont toutes les deux une raison de nourrir une certaine envie l’une envers l’autre : Mona envers la carrière de comédienne de sa cadette et Samia envers la relation privilégiée de son aînée avec son fils. On peut souligner ici, les performances époustouflantes de Leila Bekhti (Mona) et Zita Hanrot (Samia) qui transmettent avec brio les émotions des personnages par le regard : l’envie, une certaine détresse, de l’inquiétude aussi, de temps temps. Leur jeu aide grandement à installer un sentiment de gène constant chez le spectateur.

Mars Films

Un sentiment de malaise persistant

Au départ donc, tout semble bien parti. Mona vient s’installer, de façon provisoire chez sa cadette. Elles ont l’air de bien s’entendre. Pourtant dès le début, Samia ne semble pas si épanouie qu’elle le laisse paraître. Elle est toujours occupée et apparaît au bord du burn-out. Sans compter que sa vie de famille n’est pas si parfaite qu’elle en a l’air : on la voit ainsi avoir une dispute assez violente avec son mari à un moment donné. Autant dire que tout est fait pour que le spectateur en vienne à s’inquiéter pour elle et pressente que quelque chose va lui arriver.  Et, en effet, à la fin de la première partie du film, Samia disparaît des radars.
La deuxième partie du long-métrage fait alors un bond dans le temps d’un an et se concentre plus sur Mona, qui vit toujours avec Manuel et Tom. Le sentiment de malaise s’accentue à ce moment-là. Mona semble peu à peu prendre la place de sa cadette dans la vie de Manuel et Tom, comme si une sœur pouvait en remplacer une autre mais en même temps, le souvenir de Samia est encore prégnant. Il plane sur eux le spectre d’un possible retour de Samia car elle a beau avoir disparu, rien ne peut prouver un possible décès. Dans tous les cas, le sentiment d’une individualité qui s’efface au profit d’une vision des deux sœurs comme deux faces d’une même pièce est très marqué dans ce thriller où jamais la rivalité entre les deux protagonistes n’est posée clairement mais se distille, en filigrane, tout au long du récit, accentuée par une musique très anxiogène et une réalisation qui privilégie beaucoup les couleurs sombres, particulièrement le noir ou le bleu foncé.

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Autant dire donc, en conclusion que, tout dans ce film, de la mise en scène à la musique en passant par les émotions que l’ont peut lire dans le regard des actrices principales, est fait pour instaurer une atmosphère pesante, voir carrément déplaisante qui perdure jusqu’à la toute fin du long-métrage.

Amélie G.

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