Oubliez Derrick, Rex et Le destin de Lisa (les premiers titres auxquels on pense quand on entend « série allemande »). Dark, c’est clairement autre chose. Cette œuvre de 10 épisodes, créée par Baran Bo Odar, est l’une des plus grandes surprises de l’année 2017. On vous dit pourquoi. Attention, spoilers.

 

Une fausse série policière

Dark commence comme une série policière. L’action se situe en 2019, à Windem, dans une petite bourgade allemande coincée entre une forêt et une centrale nucléaire. Ce quotidien, morne et tranquille, est bouleversé par la disparition mystérieuse d’un enfant de 12 ans : Mikkel. Du schéma de la série policière, Dark n’empruntera que cela. Petit à petit, la série vogue vers le fantastique. L’intrigue principale n’est plus cette disparition mais bel et bien le voyage dans le temps. C’est à partir de l’épisode 3, « Past and Present », que Dark commence réellement. Le spectateur découvre alors les premières clefs de ce thriller temporel grâce aux flash-back. Le reste de la série se déroule sur trois époques différentes : 1953, 1986 et 2019, à travers lesquelles les personnages voyagent. Les enfants rencontrent leurs parents qui, eux, rencontrent les leurs, alors que ces derniers ne sont que des enfants. Ça vous donne la migraine ? C’est normal. À coup de boucles temporelles et de trou noir, Dark se complexifie au point de rendre accro. À chaque fois que l’on pense être sur le point de comprendre une des subtilités de l’intrigue, tout est finalement remis en cause. Le point fort ? Déstabiliser le spectateur avec intelligence.

Une esthétique au service du récit

Vous l’aurez compris, Dark est une série fondée sur la thématique du voyage dans le temps et ses interrogations métaphysiques. Sans mauvais jeux de mots, Dark est une œuvre extrêmement sombre. Une noirceur symbolisée par la souffrance des personnages et imposée par le déterminisme du temps. Il fallait donc une esthétisme en accord avec ce récit. Et c’est réussi. On en prend plein les yeux. La photographie est travaillée comme au cinéma et filmée en 70 mm, donnant ainsi une profondeur à l’image assez rare pour une série. Les images sont teintées de bleu et de vert. Les clairs obscurs, très nombreux, créent une ambiance angoissante et étouffante. Quant au cadrage, il est précis et millimétré. Les plans sont géométriques et bourrés de détails. Une certaine symétrie s’exprime, en accord avec la structure temporelle de l’histoire. On la retrouve d’ailleurs dès le générique, qui est fondé sur un jeu de miroir, façon kaléidoscope.

Un puzzle de personnages et des acteurs convaincants

Pour comprendre Dark, il faudrait presque avoir un arbre généalogique sous les yeux, afin d’avoir toujours en tête les différents liens familiaux qui se tissent entre tous les personnages. On vous rappelle que ces derniers voyagent à travers le temps et qu’ils rencontrent donc leurs ancêtres qui sont, évidemment, interprétés par d’autres acteurs. Un casting de choc donc. Si l’on n’est pas familier avec les séries allemandes ou même avec le cinéma germanique, il y a peu de chance que ces acteurs vous disent quelque chose. Pourtant, tous dégagent une certaine force. C’est le cas d’Olivier Masucci, qui interprète le rôle d’Ulrich. Il devient au fur et à mesure des épisodes, de plus en plus sombre ou encore de Louis Hoffman (Jonas), qui joue magistralement bien.

Une BO qui hérisse les poils                                       

Si on tend l’oreille, on se rend vite compte que le son et la musique ont une place à part dans cette série. D’abord le son. Il y a une certaine puissance sonore qui entoure Dark. Cette dernière renforce l’idée d’enfermement des personnages et suinte l’angoisse : bruit de la pluie, son étouffant de la grotte, tic-tac des aiguilles des montres et horloges,  cliquetis de la machine à voyager dans le temps etc. La musique quant elle, est l’un des nombreux atouts de la série. Et ça commence dès le début, avec le thème  du générique : « Goodbye », signée DJ Apparat et la chanteuse Soap & Skin. Une chanson aux sonorités à la fois inquiétantes et planantes. Chaque épisode est accompagné d’une scène en chanson. On y retrouve, par exemple, le sublime « Familiar » de la danoise Agnes Obel ou encore un autre titre de la chanteuse Soap & Skin avec « Me and the Devil ». Enfin, la musique illustre également à merveilles la boucle temporelle avec des titres eighties comme « 99 luftballons », « Irgendwie, irgendwo, irgendwann » de Nena ou « Tears for fears » de Shout.

Dark se termine malheureusement sur un florilège d’interrogations. Mais la bonne nouvelle, c’est que Netflix a officiellement signé pour une saison 2. Ce qui nous laisse le temps de trouver – peut-être – la réponse à cette interrogation : « La question n’est pas où, qui, comment, mais quand ? »

Laura Bonnet

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